J.O. Numéro 16 du 20 Janvier 1999       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 01038

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Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux


NOR : CSCL9903380X


Lorsque les régions ont été transformées en collectivités territoriales, ce qui impliquait, conformément aux dispositions de l'article 72 de la Constitution, qu'elles s'administrent par des conseils élus, la loi no 85-692 du 10 juillet 1985 a retenu un mécanisme de scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, dans le cadre de chacun des départements composant la région.
Il est assez rapidement apparu que les majorités dégagées par ce mode de scrutin étaient étroites, composites et souvent aléatoires, ce qui pouvait déboucher sur des situations de blocage, préjudiciables au bon fonctionnement de ces collectivités.
Pour pallier ces inconvénients, le Parlement a, dans un premier temps, adopté des dispositions permettant de limiter les cas d'intervention du préfet en l'absence d'adoption du budget dans les conditions de droit commun. L'article 3 de la loi no 98-135 du 7 mars 1998 permet ainsi au président du conseil régional de présenter, dans certaines conditions, un budget qui sera adopté sans vote, sauf dépôt et adoption, par la majorité absolue des membres du conseil régional, d'une « motion de renvoi » comportant en annexe un budget alternatif.
La persistance des situations de blocage, à la suite des élections du 15 mars 1998, a conduit le Gouvernement à proposer au Parlement une réforme plus profonde, portant également sur le mode d'élection des conseillers régionaux. Il s'agit de retenir désormais un mode de scrutin de liste à deux tours, inspiré de celui en vigueur pour l'élection des conseillers municipaux dans les communes de plus de 3 500 habitants et combinant les règles de la représentation proportionnelle avec la finalité majoritaire.
Cette réforme ne pouvant produire ses effets qu'après le renouvellement des conseils régionaux, il a paru nécessaire de renforcer et de compléter, à titre transitoire, le dispositif issu de la loi du 7 mars 1998 en lui adjoignant notamment, s'agissant des délibérations les plus importantes pour la conduite des affaires régionales, un mécanisme inspiré de celui du « vote bloqué » prévu par l'article 44 de la Constitution.
Tel est l'objet de la loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, adoptée le 22 décembre 1998.
Ce texte a été déféré au Conseil constitutionnel par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs. Les saisines contestent sept séries de dispositions, par des moyens qui appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes :
I. - Sur l'attribution, en cas d'égalité de suffrages,
de la prime majoritaire et du dernier siège (art. 3 et 16)
A. - Les articles 3 et 16 de la loi déférée modifient le mode de scrutin applicable aux élections régionales et à l'Assemblée de Corse. Le premier de ces deux articles remplace le mode de scrutin, intégralement proportionnel, actuellement en vigueur aux élections régionales, par un mode de scrutin combinant la proportionnelle et des éléments de scrutin majoritaire. L'article 16 modifie, de manière marginale, le mode de scrutin applicable en Corse.
Dans le cas particulier d'une égalité des suffrages entre deux ou plusieurs listes en compétition, les articles déférés marquent une évolution dans notre système électoral. Ils disposent en effet que, lorsque des candidats ou des listes de candidats se trouvent à égalité de voix, la prime du quart des sièges, ou le dernier siège en cas d'égalité des suffrages, sont attribués à la liste ayant la moyenne d'âge la moins élevée ou au candidat le moins âgé, alors que les textes antérieurs avaient coutume de faire prévaloir la solution inverse.
Les auteurs de la saisine soutiennent que ces dispositions violeraient un principe fondamental reconnu par les lois de la République, issu selon eux de la loi du 10 août 1871 et de celle du 5 avril 1884, qui prévoyaient, respectivement en matière d'élections cantonales et municipales, que l'élection est acquise, en cas d'égalité de suffrages, au candidat le plus âgé. Les sénateurs citent également, à l'appui de leur affirmation, l'article 27 de la Constitution du 24 juin 1793. Ils observent enfin que ce principe n'a jamais fait jusqu'alors l'objet d'une remise en cause.
B. - Le Gouvernement estime pour sa part que si la continuité de la tradition républicaine ne fait aucun doute et a conduit, jusqu'à présent, à faire prévaloir la solution que les auteurs du recours défendent, elle n'a pas été pour autant consacrée par la Constitution, ni, en particulier, par le préambule de la Constitution de 1946 auquel renvoie celui de 1958.
Il faut en effet souligner que la jurisprudence a pris soin de distinguer la tradition républicaine des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Ainsi, dans la décision no 88-244 DC du 20 juillet 1988, le Conseil constitutionnel souligne que « la tradition républicaine ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu'un texte législatif qui la contredit serait contraire à la Constitution qu'autant que cette tradition aurait donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République ». A défaut, la règle, rappelée notamment par la décision no 93-321 DC du 20 juillet 1993, est « qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ».
Or il est clair qu'en l'espèce le pouvoir du législateur de revenir sur ses choix antérieurs ne peut se voir opposer aucun principe fondamental reconnu par les lois de la République. Comme le rappelle en effet un auteur dans une étude récente (B. Genevois, Une catégorie de principes de valeur constitutionnelle : les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, RFDA 1998, p. 477), la reconnaissance de tels principes est subordonnée à la triple condition qu'ils touchent aux droits et libertés, qu'ils présentent un caractère essentiel et qu'ils aient reçu application avec une constance suffisante.
A l'évidence, la règle dont se prévalent les sénateurs requérants ne satisfait pas à l'ensemble de ces conditions.
D'une part, en effet, elle est étrangère à la matière des droits et libertés. D'autre part, elle ne présente pas le caractère essentiel requis par la jurisprudence (voir, par exemple, la décision no 79-107 DC du 12 juillet 1979) : il s'agit en effet d'une règle supplétive, dont la portée ne peut que rester limitée, dès lors qu'elle vise seulement les situations marginales, dans lesquelles les règles électorales normales ne permettent pas de départager des candidats.
L'abandon d'une simple tradition législative ne saurait donc justifier une censure sur le plan constitutionnel.

II. - Sur les conditions permettant aux listes de candidats d'accéder au second tour de scrutin et de participer à la répartition des sièges (art. 4)
A. - Le projet initial du Gouvernement proposait de fixer le seuil prévu pour figurer au second tour des élections régionales à 10 % des suffrages exprimés au premier tour, le seuil pour pouvoir fusionner avec une autre liste en vue de second tour étant de 5 % des suffrages. La répartition des sièges était limitée aux listes ayant recueilli au moins 5 % des voix, tandis que la prime attribuée à la liste arrivée en tête à l'issue du scrutin était de 25 % des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur.
Compte tenu des objections auxquelles le choix de ces seuils s'est heurté au cours des débats, un amendement du Gouvernement, adopté par le Parlement, a permis d'abaisser de 5 % à 3 % des suffrages exprimés le seuil autorisant la fusion de listes en vue du second tour, le seuil permettant d'accéder au second tour étant, quant à lui, ramené de 10 % à 5 % par un amendement parlementaire.
Pour contester le choix ainsi opéré par le législateur, les députés, auteurs de la première saisine, font valoir que l'abaissement de ces seuils contredit l'objectif, poursuivi par le législateur, de favoriser l'émergence de majorités stables au sein des conseils régionaux.
Les requérants ajoutent que ces dispositions violent un objectif constitutionnel de clarté, qui s'imposerait au législateur en matière de scrutins politiques. Ils soutiennent qu'un « impératif de transparence » doit inspirer le choix d'un mode de scrutin, auquel s'imposent notamment les caractères universel, égal et secret du suffrage prévus par l'article 3 de la Constitution.
B. - Pour sa part, le Gouvernement considère que ces critiques ne sont pas de nature à remettre en cause la conformité de ces dispositions à la Constitution.
De manière générale, on relèvera d'abord que les critiques tenant à une prétendue contradiction entre l'objectif du projet initial et le texte voté sont dépourvues de portée utile sur le plan constitutionnel.
On observera ensuite que la loi adoptée reste, en tout état de cause, cohérente avec l'objectif poursuivi par le législateur qui est, certes, d'assurer une majorité dans les conseils régionaux, mais aussi de donner la représentation en sièges la plus fidèle possible du vote du corps électoral. Il convient en effet de souligner que le texte retient un mode de scrutin combinant les règles de la représentation proportionnelle avec la finalité majoritaire. Dans un scrutin de ce type, il n'est pas anormal que la représentation la plus large des courants politiques soit permise.
C'est d'ailleurs pour cette dernière raison que la prime majoritaire a été limitée à un quart des sièges, alors qu'elle est de la moitié des sièges pour les élections municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus.
Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le choix retenu ne remet pas en cause le souci d'efficacité qui était à l'origine du projet : quels que soient les seuils, la logique d'un scrutin à deux tours incite fortement au regroupement des listes entre les deux tours, d'autant que la prime majoritaire favorisera le camp qui saura s'unir. De plus, le réflexe de « vote utile » des électeurs au second tour devrait pénaliser des listes qui se maintiendraient, alors que la logique politique aurait dû les conduire à fusionner.
On notera en outre qu'en application du système de prime mis en place, il suffit à une liste d'obtenir un tiers des suffrages au second tour pour s'assurer de la majorité des sièges de l'assemblée régionale (25 % des sièges au titre de la prime auxquels s'ajouteraient 25 % représentant un tiers des 75 % des sièges restant à répartir à la représentation proportionnelle après attribution de la prime), quel que soit le niveau des seuils.
Même avec des seuils apparemment bas, le système reste donc efficace.
S'agissant enfin de l'objectif de « clarté » pour les électeurs, les députés, auteurs de la saisine, paraissent se référer à la jurisprudence dégagée, à propos d'une consultation organisée en application du troisième alinéa de l'article 53 de la Constitution, par la décision no 87-226 DC du 2 juin 1987, qui énonce que la question posée aux populations intéressées, dans le cadre de ces dispositions, ne doit pas comporter d'équivoque. On peut se demander si une telle jurisprudence, relative aux conséquences à tirer de l'article 53 en tant qu'il exige, pour toute cession de territoire, « le consentement » des populations intéressées, est directement transposable à l'examen d'une loi fixant le régime électoral d'assemblées locales.
En tout état de cause, et en admettant même que ce souci légitime de clarté corresponde à une norme constitutionnelle, le texte contesté y satisfait pleinement. Il n'y a, en effet, aucune raison pour que les électeurs soient déroutés par un mode de scrutin dont ils ont pris l'habitude aux élections municipales dans les communes de 3 500 habitants ou plus. Au demeurant, la question de savoir si le seuil permettant un maintien au second tour est de 5 % ou de 10 % ne constitue pas un élément essentiel à la « lisibilité » du mode de scrutin.

III. - Sur l'obligation d'assurer la parité
entre les candidats féminins et masculins (art. 4 et 17)
A. - Les articles 4 et 17 de la loi déférée font obligation aux listes candidates aux élections régionales et à l'Assemblée de Corse d'assurer la parité entre les hommes et les femmes. Ces dispositions ont été introduites par un amendement d'origine parlementaire.
Les sénateurs, auteurs de la seconde saisine, estiment que les articles déférés méconnaissent les articles 3 de la Constitution et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, tels qu'interprétés par la jurisprudence.
B. - L'état du droit en la matière résulte de la décision no 82-146 DC du 18 novembre 1982, qui a jugé contraire à la Constitution une disposition qui empêchait les listes de candidats de comporter plus de 75 % de personnes du même sexe.
En l'espèce, on peut relever que les dispositions déférées ne sont pas d'une nature strictement identique à celles en discussion en 1982. En effet, en adoptant les articles 4 et 17, le législateur a entendu non pas créer des catégories entre éligibles, mais poser les conditions d'une égalité plus réelle entre les femmes et les hommes.
Ce faisant, le législateur a entendu mettre en oeuvre le principe posé par le troisième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, qui prévoit que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ». Le législateur a ainsi entendu donner, en matière politique, un contenu à un principe affirmé depuis plus de cinquante ans par le constituant, mais dont l'application est restée de peu d'effet, si l'on observe la proportion des mandats détenus respectivement par les hommes et par les femmes dans les assemblées politiques et les organes délibérants des collectivités locales. Il en ressort que la proportion des mandats exercés par des femmes est parmi les plus faibles de l'Union européenne.
En ce qui concerne plus particulièrement les élections régionales, on note que les femmes représentent, en 1998, moins de 37 % des candidatures, et à peine le quart des élus.
Il appartiendra au Conseil constitutionnel d'apprécier si cette initiative se heurte aux mêmes obstacles constitutionnels que le dispositif qui était en cause en 1982.

IV. - Sur la modification de la composition
du collège électoral sénatorial (art. 20 et 21)
A. - Les articles 20 et 21 de la loi modifient les articles L. 280 et L. 293-1 à L. 293-3 du code électoral relatifs à l'élection des sénateurs, afin de tirer les conséquences du choix d'une circonscription régionale pour l'élection des membres des conseils régionaux.
Pour contester ces dispositions, les sénateurs, auteurs du second recours, soutiennent que l'article LO 274 du code électoral, qui précise que les sénateurs sont élus « dans les départements », serait méconnu par l'extension aux régions du système applicable dans la collectivité territoriale de Corse, depuis la promulgation de la loi no 91-428 du 13 mai 1991. Par là même, le législateur aurait méconnu le principe de hiérarchie des normes qui exige qu'une disposition de nature organique ne puisse être modifiée par la loi ordinaire.
Aux yeux des requérants, cette extension serait contestable pour le motif que des élus extérieurs à un département participeraient alors à la désignation des sénateurs représentant ce dernier.
B. - Ces critiques reposent sur une interprétation inexacte des règles constitutionnelles régissant cette matière.
Il importe en effet de souligner que les dispositions contestées ont été élaborées en tenant compte de la jurisprudence issue de la décision no 91-290 DC du 9 mai 1991 relative à la Corse. Dans cette affaire, le conseil a écarté des moyens de même nature qui étaient opposés à des dispositions identiques. On rappellera à cet égard que la décision précitée a jugé qu'une disposition relative au mode de désignation des délégués au sein des collèges électoraux sénatoriaux « n'empiète pas sur la compétence réservée à la loi organique par la Constitution ».
En l'espèce, les articles 20 et 21 sont conçus sur le modèle des dispositions équivalentes de la loi de 1991. Ils ne modifient pas davantage les conditions d'élections des sénateurs, qui continuent à être désignés dans le cadre du département.
Pas plus que la loi relative à la Corse, la présente loi ne fait disparaître le département en tant que circonscription électorale pour l'élection des sénateurs. La décision no 91-290 DC relève d'ailleurs que l'article LO 274 ne fait pas obstacle à ce que les dispositions législatives relatives au régime électoral du Sénat organisent la participation au collège électoral sénatorial de délégués de collectivités territoriales autres que le département, conformément à l'article 24 de la Constitution qui impose que les différentes collectivités territoriales soient représentées au Sénat.
Le Gouvernement considère que ces principes sont exactement transposables dès lors que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la conformité à la Constitution des dispositions identiques de la loi sur la Corse n'est en rien fondée sur le caractère de cette collectivité territoriale particulière. Au demeurant, son régime particulier n'implique nullement que les règles qui la régissaient soient nécessairement et fondamentalement différentes de celles applicables aux conseils régionaux. Tout au contraire, si l'article L. 4421-1 du code général des collectivités territoriales (qui codifie l'article 2 de la loi du 13 mai 1991) dispose que la Corse constitue une collectivité territoriale de la République, ce même article lui rend applicable les dispositions de la première partie de ce code, communes à toutes ces collectivités, ainsi que celles de la quatrième partie, relative aux régions, en ce qu'elles ont de non contraires.
On voit ainsi mal pour quelles raisons des dispositions qui ne sont actuellement limitées à la Corse qu'en raison du mode de scrutin particulier applicable à l'élection à l'Assemblée de Corse ne pourraient être étendues aux régions dès lors que le mode de scrutin qui leur est désormais applicable s'inspire très directement de celui déjà appliqué en Corse.

V. - Sur les conditions de vote des délibérations budgétaires
et fiscales des conseils régionaux
A. - Le titre III de la loi déférée comporte des dispositions qui tendent, dans le prolongement des aménagements apportés par la loi du 7 mars 1998 à la procédure d'adoption des budgets régionaux, à renforcer, à titre transitoire, les mécanismes permettant de faire face à la situation complexe des régions dans lesquelles n'existe pas de majorité absolue. Le texte prévoit principalement, à cet égard, deux types de mesures :
- d'une part, l'article 22 dispose qu'à l'issue de l'examen du budget, voté conformément aux règles de droit commun par chapitre ou par article , le président du conseil régional peut soumettre à un vote d'ensemble le projet de budget initial, éventuellement modifié pour prendre en compte la discussion intervenue. Il s'agit, en substance, de transposer le mécanisme de « vote bloqué » défini au troisième alinéa de l'article 44 de la Constitution ;
- d'autre part, l'article 23 permet l'application du mécanisme d'adoption sans vote défini par la loi du 7 mars 1998 aux délibérations relatives au vote des taux des impôts régionaux, ainsi qu'à deux décisions budgétaires modificatives.
Les parlementaires auteurs des deux saisines estiment inconstitutionnelles, tant la nouvelle procédure de vote bloqué (art. 22 de la loi) que les aménagements apportés à la procédure d'adoption sans vote des budgets (art. 23). Ces dispositions méconnaîtraient, d'après eux, le principe de libre administration des collectivités locales par des conseils élus énoncé par l'article 72 de la Constitution, ainsi que les articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
B. - Le Conseil constitutionnel ne saurait accueillir ces critiques, qui reposent à la fois sur une analyse inexacte du cadre juridique régissant la matière et sur une interprétation erronée des dispositions contestées.
1. S'agissant du cadre juridique, le Gouvernement entend formuler les deux séries d'observations suivantes :
a) En premier lieu, les requérants se méprennent sur la signification exacte du principe de libre administration des collectivités territoriales.
En effet, ce principe concerne essentiellement la question des rapports entre l'Etat et les collectivités territoriales, d'une part, et celle de la répartition des attributions et des prérogatives entre ces différentes collectivités, d'autre part. C'est seulement dans la mesure où l'article 72 de la Constitution précise que ces collectivités s'administrent « par des conseils élus » que la question des rapports, au sein de la collectivité, entre l'exécutif et l'organe délibérant peut se poser sous un angle constitutionnel. Mais la réponse que la jurisprudence y apporte est dépourvue d'ambiguïté : il appartient au législateur de déterminer les conditions dans lesquelles s'applique ce principe, sous la seule réserve de ne pas en dénaturer la portée et, notamment, de ne pas dépouiller l'organe délibérant de toute attribution effective (no 85-196 DC du 8 août 1985 ; no 87-241 DC du 19 janvier 1988).
b) En second lieu, il convient de souligner que les dispositions critiquées ont été élaborées à la lumière de la décision no 98-397 DC du 6 mars 1998, qui a rejeté des contestations analogues soulevées à l'encontre de la procédure d'adoption du budget sans vote prévue par le texte promulgué le 7 mars 1998.
Ce faisant, le Conseil s'est en réalité borné à constater que la critique adressée au texte manquait en fait, le dispositif ayant pour objet de rendre plus effective la libre administration des régions. Mais l'on ne peut inférer ni de cette décision, ni, de manière générale, de la jurisprudence, qu'un tel encadrement des mécanismes de décision au sein du conseil régional ne pourrait être admis que pour conjurer un péril menaçant la continuité des services assurés par cette collectivité ou pour prévenir son dessaisissement au profit de l'autorité de tutelle.
C'est dire que le Parlement ne fait qu'exercer le pouvoir d'appréciation que lui reconnaissent en la matière les articles 34 et 72 de la Constitution, lorsqu'il définit les conditions dans lesquelles peuvent être adoptées, ou réputées adoptées, des délibérations du conseil régional. Et il en résulte que rien n'interdit au législateur de prévoir que des modalités de « vote bloqué » peuvent être instituées pour garantir la cohérence des choix budgétaires opérés par le conseil régional. De telles dispositions contribuent en effet à poser les conditions d'une bonne administration des collectivités territoriales.
2. En outre, les requérants se méprennent sur la portée exacte des articles 22 et 23.
Contrairement, en effet, à ce qu'ils soutiennent, les articles 22 et 23 de la nouvelle loi ne dessaisissent pas l'assemblée régionale de sa compétence.
a) S'agissant de l'article 22, il a pour seul objet d'autoriser le président de la région à demander une seconde délibération pour que le conseil régional se prononce globalement, mais en toute connaissance de cause, sur le projet de budget établi par l'exécutif.
On soulignera d'abord, à cet égard, que ce vote bloqué ne peut intervenir qu'au terme de l'examen et du vote par chapitres et par articles du projet de budget dans les conditions de droit commun définies par l'article L. 4311-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
En outre la loi, en ouvrant la possibilité de modifier le projet de budget initial par « un ou plusieurs des amendements soutenus ou adoptés au cours de la discussion », n'implique pas le rejet systématique de tous les amendements adoptés par le conseil régional pendant l'examen des chapitres et articles du projet de budget.
On observera ensuite que la loi n'ôte pas à l'assemblée le droit de refuser ce projet en se prononçant en ce sens à la majorité : le conseil régional demeure donc souverain dans l'exercice effectif de ses attributions.
En réalité, le mécanisme contesté a le mérite d'ouvrir une ultime possibilité de faire adopter le budget par un vote de l'assemblée, avant mise en oeuvre de la procédure d'adoption sans vote, plus dérogatoire au droit commun, mais dont la légitimité a été reconnue par la décision précitée du 6 mars 1998.
Le choix d'un mécanisme spécifique de vote se justifie par le caractère propre du budget, acte essentiel qui permet la mise en oeuvre de la politique régionale, telle que définie par la majorité du conseil et plus particulièrement son président, notamment à l'occasion de l'obligation désormais faite aux candidats à la présidence de remettre « une déclaration écrite présentant les grandes orientations politiques, économiques et sociales de son action pour la durée de son mandat » conformément aux dispositions de l'article L. 4133-1 du CGCT issues de la loi du 7 mars 1998.
Ce budget ne saurait donc se résumer à une somme de chapitres et d'articles prévoyant et autorisant des montants de recettes et de dépenses. Il doit au contraire constituer un tout cohérent.
Cette nécessaire cohérence impose d'ouvrir au président la possibilité de demander un nouveau vote d'ensemble à la suite du vote de chacun des chapitres et articles du budget, qui vaut adoption du budget conformément aux dispositions du 1o de l'article 22 de la loi. En effet, eu égard au droit d'amendement reconnu à l'assemblée délibérante, il n'existe aucune garantie que le budget ainsi adopté :
- d'une part, respecte les règles d'équilibre prévues par la loi aux articles L. 1612-4 et suivants du CGCT ;
- d'autre part, soit conforme aux grandes orientations de politique générale définies par le président de la région.
Ce besoin de cohérence vaut également pour les décisions modificatives, dont il arrive qu'elles doivent être prises sous le sceau de l'urgence, par exemple pour la réalisation de travaux urgents, alors que les mêmes difficultés risquent d'exister pour dégager à cette occasion une majorité de gestion stable.
On rappellera, au surplus, que ce dispositif présente un caractère transitoire, l'article 27 de la loi prévoyant la disparition de cette procédure à l'occasion du prochain renouvellement des conseils régionaux, ou le cas échéant d'un conseil régional, une fois mis en oeuvre le nouveau mode de scrutin.
Pour autant, ce caractère transitoire - au demeurant absent dans le dispositif validé par la décision, déjà citée, du 6 mars 1998 - ne paraît pas constituer une condition nécessaire à la reconnaissance du caractère constitutionnel de mécanismes dérogatoires de vote. On peut d'ailleurs relever qu'il existe au moins un précédent législatif limitant le pouvoir de l'assemblée délibérante à l'adoption ou au rejet d'un projet de budget : le vote du budget annexe des sections de communes par les conseils municipaux, sur proposition de la commission syndicale, conformément aux dispositions de la loi du 9 janvier 1985, codifiées à l'article L. 2412-1 du CGCT.
Enfin, il convient de considérer cette nouvelle procédure de vote bloqué comme constituant un tout avec la procédure d'adoption sans vote du budget. Comme l'avait relevé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 mars 1998, cette dernière vise à assurer la continuité des services publics et à éviter le dessaisissement des organes délibérants au profit du représentant de l'Etat dans des régions dépourvues de majorités stables eu égard à leur mode de scrutin, que la même loi réforme par ailleurs. Son caractère dérogatoire a conduit à limiter, dans la nouvelle loi (art. 23), les possibilités d'y recourir aux cas de rejet explicite du budget. Il convient dès lors d'offrir au président de la région et à son assemblée une nouvelle chance d'adopter par un vote un budget cohérent, et ce dans les meilleurs délais, avant que le constat de l'absence de vote du budget au 30 mars (ou au 30 avril les années de renouvellement des assemblées délibérantes) n'entraîne la saisine par le préfet de la chambre régionale des comptes, dans les conditions prévues à l'article L. 1612-2 du CGCT.
b) Les mêmes arguments valent en ce qui concerne la procédure d'adoption sans vote aménagée par l'article 23 de la nouvelle loi.
L'extension du champ de cette procédure est indispensable, eu égard au lien consubstantiel entre décisions de vote des taux et décision budgétaire. Celle-ci inclut en effet le vote des produits attendus de la fiscalité locale, c'est-à-dire du produit issu de l'application, à des bases notifiées par les services fiscaux, de taux d'imposition librement votés par la collectivité.
Comme le notent les requérants, ces deux décisions distinctes doivent logiquement être simultanées pour garantir la conformité entre produits votés dans le budget et recettes effectivement mises en recouvrement en application des taux fixés par la collectivité. A défaut, les recettes inscrites au budget seraient insincères, ce qui risquerait de remettre en cause l'équilibre même du budget entre dépenses et recettes.
Ces deux délibérations s'avérant indissociables, il est logique de donner à l'assemblée locale les moyens de voter des taux d'imposition conformes aux recettes inscrites dans le budget pour la mise en oeuvre des politiques régionales.
Ceci suppose d'associer les décisions fiscales à la délibération budgétaire pour garantir la conformité des décisions et donc la cohérence et la légalité du budget dans des assemblées dépourvues de majorité stable.
En outre, l'extension ainsi prévue de la procédure d'adoption sans vote aux décisions fiscales annuelles, loin de dessaisir l'assemblée délibérante de ses pouvoirs, contribue bien au contraire à les renforcer.
En effet, les mêmes causes qui ont empêché un vote positif du budget devraient logiquement entraîner le rejet des dispositions fiscales permettant d'assurer le financement de ce budget sur lequel elle n'a pu se mettre d'accord. Or, en l'absence de vote par le conseil régional, l'article 1639 A du code général des impôts dispose que sont reconduits les taux de l'année précédente.
L'exclusion des décisions fiscales annuelles de la procédure d'adoption sans vote du budget reviendrait alors vraisemblablement à interdire toute modification des taux de la fiscalité directe locale pendant toute la durée du mandat des conseillers régionaux. Cela vaudrait tant dans le cadre du projet du président de la région que dans celui de la contre-proposition budgétaire annexée à la motion de renvoi déposée par une majorité alternative au sein du conseil. Leur inclusion rend au contraire à l'assemblée délibérante la maîtrise de la fiscalité locale, première recette budgétaire en volume.
Il convient de noter également que l'extension ainsi opérée par le législateur se limite strictement aux décisions annuelles de vote des taux, à l'exclusion de toute décision pérenne telle que le vote d'exonérations pour certains contribuables.
Enfin, l'argumentation tirée des articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne peut qu'être écartée pour les raisons que le Conseil constitutionnel a retenues dans sa décision du 6 mars 1998 en réponse à une contestation analogue.

VI. - Sur la publicité
des séances de la commission permanente (art. 24)
A. - Issu d'un amendement parlementaire, l'article 24 de la loi soumet les séances de la commission permanente au même régime de publicité que les séances du conseil régional : réunions publiques avec possibilité de décider le huis clos à la majorité absolue des membres présents ou représentés, sur demande de cinq conseillers ou du président (art. L. 4132-10 du CGCT).
Pour contester le choix ainsi fait par le législateur, les sénateurs, auteurs de la seconde saisine, font valoir qu'en vertu de l'article 72 de la Constitution, le conseil régional devrait demeurer libre d'en décider, dans le cadre de son règlement intérieur, sans que le législateur puisse le lui imposer.
B. - Le Gouvernement considère, au contraire, que cette disposition ne peut se voir opposer aucun principe constitutionnel.
Comme le Conseil constitutionnel l'a récemment souligné à propos des ressources des collectivités locales, la compétence du législateur pour aménager les conditions d'exercice de leur libre administration ne rencontre de limites que dans la mesure où les dispositions qu'il adopte reviendraient à entraver cette libre administration (no 98-405 DC du 29 décembre 1998).
Tel n'est évidemment pas le cas de dispositions relatives à la publicité des séances d'un organe délibérant de la région.
Le choix ainsi fait repose, au demeurant, sur de solides justifications. En effet, l'étendue des délégations dont peut bénéficier la commission permanente justifie que lui soit appliquée l'obligation de publicité qui régit les séances du conseil régional : en vertu de l'article L. 4221-5 du CGCT, la commission permanente peut en effet recevoir de très larges délégations du conseil régional, à la seule exception des décisions de nature budgétaire. Depuis la réforme opérée par la loi du 6 février 1992, la commission permanente est ainsi devenue une formation restreinte du conseil régional, c'est-à-dire un véritable organe délibérant, qui se distingue ainsi du bureau, ce dernier constituant quant à lui l'exécutif. Cette distinction est, davantage encore, mise en évidence par la modification apportée par l'article 25 de la présente loi à l'article L. 4133-8 du CGCT, qui rend obligatoire l'existence d'un bureau dans toutes les régions.
Dans ces conditions, et alors que cette modification ne remet pas en cause le principe suivant lequel l'exécutif délibère en secret, le législateur a tiré les conséquences logiques du caractère d'organe délibérant de la commission permanente en lui appliquant la règle constante suivant laquelle les organes collégiaux auxquels les citoyens, en les élisant, ont confié un pouvoir de décision, délibèrent en public, afin que ces citoyens puissent contrôler l'action de leurs représentants élus.
L'extension des règles de publicité applicables aux séances du conseil régional est d'autant plus logique que rien, dans la loi actuelle, n'interdit que la commission permanente soit composée de la totalité des membres du conseil régional. La différence de régime permettrait, le cas échéant, de contourner l'obligation de publicité des séances du conseil régional.
On relèvera d'ailleurs que la question s'est posée, devant le Conseil d'Etat, de savoir si les dispositions issues de la loi précitée du 6 février 1992 ne devaient pas être d'ores et déjà interprétées, dès lors qu'elles dotaient la commission permanente d'importants pouvoirs, comme rendant applicable, à ce nouvel organe délibérant de la région, la règle de publicité régissant les séances du conseil régional. Le commissaire du Gouvernement avait proposé au Conseil d'Etat de répondre par l'affirmative, en se fondant notamment sur l'importance des pouvoirs qu'à la différence de l'ancien bureau, la commission permanente pouvait être conduite à exercer aux lieu et place du conseil régional, et sur l'idée que la publicité des séances est le corollaire de l'exercice d'un pouvoir délibérant (cf. concl. J.H. Stahl sur CE, As. 18 décembre 1996, région Centre, RFDA 1997, p. 496). Si le Conseil d'Etat ne l'a pas suivi, ce n'est pas en raison d'un principe constitutionnel qui aurait fait obstacle à ce que la loi fût interprétée en ce sens, mais seulement parce qu'il a considéré qu'à défaut de l'avoir expressément prévu, elle ne pouvait être comprise comme l'impliquant nécessairement.
On soulignera enfin que l'obligation de publicité des séances ne constitue qu'une règle de fonctionnement des assemblées élues qui ne peut s'analyser comme une restriction à la liberté d'agir des collectivités territoriales et de leurs conseils élus. Cette règle introduit seulement de la transparence, vis-à-vis des citoyens, dans le fonctionnement d'un organe qui n'a cessé de prendre de l'importance dans l'organisation des régions.
La mesure contestée ne soumet pas pour autant les élus régionaux à une surveillance de tous les instants puisque la loi permet, comme pour les conseils régionaux, de décider le huis clos pour des affaires qui le justifient.
C'est donc à tort que les requérants y voient une violation de l'article 72 de la Constitution.

VII. - Sur l'entrée en vigueur de la loi
A. - L'article 27 de la loi apporte plusieurs précisions sur les conditions d'entrée en vigueur de certaines de ses dispositions.
Sans critiquer directement la rédaction de cet article , les auteurs de la saisine reprochent au législateur de ne pas avoir prévu de dispositions spécifiques permettant d'éviter les inconvénients qui résulteraient, selon eux, du silence de la loi sur l'entrée en vigueur d'autres dispositions. Ils considèrent en particulier que l'application immédiate de la loi empêcherait, faute d'un cadre législatif approprié, l'organisation d'élections régionales consécutives à une éventuelle annulation des élections du 15 mars 1998 dans un seul département.
De surcroît, en cas de dissolution d'un conseil régional sur la base de l'article L. 4132-3 du code général des collectivités territoriales, la loi méconnaîtrait l'égalité du suffrage en permettant la coexistence d'un conseil élu selon le nouveau mode de scrutin avec des assemblées élues suivant l'ancien système.
Le même principe d'égalité du suffrage serait en outre méconnu à l'occasion du renouvellement d'une série de sénateurs en 2001, celle-ci n'étant pas élue, contrairement aux deux autres séries, par des conseillers régionaux exclusivement issus du département. L'insuffisance des mesures transitoires conduit enfin les sénateurs à considérer que le législateur n'aurait pas épuisé la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution.
B. - Ces critiques ne sont pas susceptibles de remettre en cause la conformité du texte à la Constitution.
1. En premier lieu, en évoquant l'absence de cadre législatif pour pourvoir au remplacement de conseillers régionaux dont l'élection serait invalidée, les requérants font implicitement référence aux contentieux qui restent actuellement pendants devant le Conseil d'Etat. On voit mal toutefois les motifs pour lesquels le législateur aurait méconnu des textes ou des principes de valeur constitutionnelle en ne prévoyant pas expressément une telle hypothèse.
Il est clair, en effet, que le législateur a entendu édicter de nouvelles règles permettant, ainsi qu'il en avait le loisir, d'élire un conseil régional qui serait intégralement renouvelé selon un mode de scrutin jugé meilleur, car plus à même de dégager des majorités.
Ce faisant, la loi n'a clairement entendu abroger la législation actuelle que pour autant que le renouvellement du conseil régional sera intégral. Il en résulte nécessairement que les anciennes dispositions restent en vigueur, tant que les conditions requises par le nouveau texte pour qu'il puisse s'appliquer ne sont pas réunies.
Toute autre lecture méconnaîtrait les principes les mieux établis en matière d'application de la loi dans le temps. Elle risquerait d'ailleurs de se heurter à des principes de valeur constitutionnelle, soit en mettant fin par anticipation au mandat des conseillers régionaux élus dans les autres départements, soit en privant les habitants d'une partie de la région de représentants au sein de la collectivité régionale.
Le moyen des requérants manque donc en fait, la loi ne pouvant avoir la portée qu'ils lui prêtent.
2. En deuxième lieu, il n'est pas contraire à l'égalité du suffrage qu'un conseil régional, dissous en application de l'article L. 4132-3 du code général des collectivités territoriales, puisse être réélu suivant un mode de scrutin distinct de celui qui était antérieurement en vigueur lorsqu'ont été élus les autres conseils régionaux, comme le prévoit implicitement la loi, et comme l'implique d'ailleurs la rédaction du second alinéa du III de l'article 27.
Une telle situation n'est, là aussi, que la conséquence logique des principes les plus constants en matière d'entrée en vigueur d'une législation nouvelle.
En tout état de cause, il convient d'insister sur le caractère très hypothétique de la situation envisagée, puisque l'article L. 4132-3 du code précité n'a pas encore trouvé matière à s'appliquer.
3. S'agissant, en troisième lieu, des modalités de désignation des sénateurs appartenant à la série renouvelée en 2001, elles ne sauraient être jugées contraires au principe d'égalité du suffrage. Le mode de scrutin applicable à cette désignation n'est pas modifié, non plus que le nombre de sièges à renouveler. De même, le nombre de conseillers régionaux membres du collège électoral sénatorial demeure celui prévu par le tableau no 7 annexé au code électoral, issu de la loi no 91-1384 du 31 décembre 1991. En outre, la représentation des conseillers généraux dans le collège électoral reste inchangée.
Là encore, la situation transitoire dans laquelle les requérants voient une difficulté n'est que la conséquence inévitable du caractère nécessairement progressif - eu égard au mode de renouvellement des sénateurs - des répercussions de la présente réforme sur la composition des collèges électoraux.
On notera d'ailleurs que coexistent actuellement deux modes de scrutin applicables à la désignation des membres du Sénat, selon le nombre d'élus par département, sans que cela ait été regardé comme contraire à l'égalité du suffrage. De même peut-on observer qu'au sein des collèges électoraux figurent des délégués des conseils municipaux élus selon des règles différentes selon la taille des communes.
Il convient enfin de rappeler que par une décision no 66-30 DC du 8 juillet 1966, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution la loi no 66-504 du 12 juillet 1966, qui prévoyait l'augmentation du nombre de sièges de sénateurs du fait de la création de nouveaux départements. Ce texte, applicable au renouvellement triennal de 1968, introduisait pourtant une modification substantielle dans la composition d'une des trois séries constituant le Sénat.